On parle de nous, à propos du projet de loi sur l’aide active à mourir, en tant qu’alternative crédible à une vision réductrice de l’accompagnement. Loin de prendre parti, la médecine de la complexité peut être une forme de réconciliation entre deux visions du monde différentes.
(...) La médecine de la complexité est médecine de la relation. La médecine qui fait de la relation son objet de soin, un objet partagé avec le patient et dans lequel le soignant est également impliqué en tant qu’individu. On voudrait maintenir la symptomatologie exclusivement au sein du patient, alors que nous pourrions aussi inférer que c’est la relation qui se ferait « caisse de résonnance » d’une souffrance s’y déployant et envahissant de manière asymétrique le « devenant-soigné ».
Et si cette approche pouvait permettre d’analyser les demandes de mort autrement ? Non pour les faire taire. Ni pour gagner du temps et éviter de prendre ce que d’aucuns considèreraient comme relevant de nos responsabilités, à savoir hâter la mort. Mais pour remettre en mouvement – et non prétendre comprendre - ce qui se joue pour la personne et pour le groupe formé avec les proches et les soignants. Sans rester sur la seule analyse systémique. Mais en provoquant une entropie, un désordre « encadré » et non anxiogène, propice au changement de perspective. En l’entretenant malgré nous, et c’est sans doute le plus audacieux. Et en ouvrant des pistes thérapeutiques encore inexplorées.
Des propositions existent déjà. L’association NAULIMUS en est un exemple : « Ces problématiques ne sont pas spécifiques aux soins palliatifs mais concernent les spécialités médicales mobilisées dans le contexte de situations de haute vulnérabilité : medecine de la douleur chronique, psychiatrie institutionnalisée, grand handicap… Il ne s’agit pas de prôner une surspécialité, mais plutôt une approche transversale et distributive, car en Interdisciplinarité. En incertitude assumée ». NAULIMUS vient de publier son manifeste pour une médecine de la complexité, texte travaillé avec plusieurs experts réunis sous une même volonté : apaiser la souffrance de l’individu en relation qui fait société. Il s’agit d’une proposition offrant un nouvel environnement réflexif, une véritable contre-proposition à l’offre réductrice prônée par la vision « conséquentialiste ». Apaiser autrement que par l’interruption de ce qui semble déranger. Déranger qui d’ailleurs ? (...)