En pratique, comment aborder ce que serait une médecine de la complexité ?
Elle serait un exercice partagé par celles et ceux qui se confrontent aux situations de haute vulnérabilité. En aucun cas une nouvelle sur-spécialité. Mais la possibilité d’échanger en recourant à un appareillage complexe, allant du mode d’organisation des RCP à la structuration clinique de la situation considérée.
Elle serait la dynamique passant de la pluridisciplinarité à l'interdisciplinarité, avec ses tensions fructueuses, à la transdisciplinarité avec l'organisation concrète d'une projection en un espace post-anamorphique. C’est-à-dire un espace rompant la dualité consentie par le seul soi pour « plus » et « moins » que cela. Entrée en matière aux entités de soi(s).
Mais ce serait quoi d’autre encore une « médecine de la complexité » ?
- C’est rompre avec la médecine complexe (entre-soi difficilement transmissible),
- C'est refuser le réductionnisme conséquentialiste (« à quoi bon se perdre en réflexions éthiques, il va finir par mourir à la fin »),
- C'est s'offrir la possibilité de se laisser surprendre et de faire des découvertes (sérendipité),
- C'est faire lien entre la médecine palliative, la médecine de la douleur, les médecines du grand handicap, la médecine génésique (médecine de l'extrême),
- C'est enseigner et étudier l'incertitude en santé (contrer/ignorer, gérer, utiliser),
- C'est refuser la doxocratie, l'ochlocratie brutale, la « dict-ego-cratie » (poursuivre un projet républicain fort).
Naulimus pilote ce projet fondateur.
Il s’agit en premier lieu d’identifier un accès et un point d'accroche possibles sur le plan universitaire. La problématique de l'incertitude voire des incertitudes en médecine, et plus largement en santé, semble offrir cette opportunité. Les situations de haut degré de vulnérabilité exposent à un plus grand niveau d’incertitude (partagée) et de contraction décisionnelle. Cette exposition nous paraît aller de pair avec la notion architectonique de « points obscurs » ou « zones d’impensés », dont on suspecte la présence au sein de l’écosystème complexe des entités de soi(s). Nous avons donc débuté un programme de collecte d’articles ayant trait à ces incertitudes. Des articles originaux ou réinterprétés à l’aune du contexte d’élaboration d’une médecine de la complexité. Des articles qui constitueront le socle d’un enseignement à destination des étudiants en santé.
Dr Sébastien ABAD